La Boîte à outils
De janvier 2011 à mars 2015, 11 ouvrages ont ainsi paru sous cette forme de hors-série, dont les commandes sont disponibles auprès de Institutions-FIAC ou auprès des auteurs responsables.
La Boîte à outils fut une collection de hors-série de la revue Institutions-FIAC dirigée par Pierre Delion et Jean Oury de 2011 à 2015, et créée pour accueillir des textes fondamentaux, introuvables, inédits ou à rediffuser, comme autant d'outils supplémentaires à la psychiatrie, la psychanalyse, la psychothérapie et la pédagogie institutionnelles.
En même temps que l'essor pris par la revue Institutions au sein des associations culturelles et au-delà, cette collection s'est associée à l'enjeu, cher à Jean Oury, d'élargir l'espace fédératif à l'aide de reproduction d'ouvrages gérés ou co-gérés par la FIAC, créant de fait d'autres liens institutionnels.
De janvier 2011 à mars 2015, 11 ouvrages ont ainsi paru sous cette forme de hors-série, dont les commandes sont disponibles auprès de Institutions-FIAC ou auprès des auteurs responsables.
Elisabeth Gailledrat
Responsable éditoriale revue Institutions-FIAC, depuis octobre 2002
Présidente des Éditions Le Pli
Directrice collection "Psychanalyse" aux Éditions Hermann
* * *
Catalogue
Février 2011
Hélène Chaigneau, Paroles
Préface Michel Balat, avant-propos Lise Gaignard
Hélène Chaigneau, Paroles
Préface Michel Balat, avant-propos Lise Gaignard
“ Je crois que le nerf de la psychothérapie institutionnelle, c’est bien cette tendance anti-consensuelle, cette absence de peur du conflit pour laisser s’installer et triompher paisiblement l’atitude qui consiste à regarder le conflit en face et voir ce qu’on peut en faire, arriver par une analyse tous ensemble à distinguer le compromis inévitable de la compromission condamnable.“ Hélène Chaigneau. 20€
Avril 2012
Fernando Vicente, La parole en psychiatrie. Encore efficace ?
Lire l'argument de Pierre Delion en son entier plus loin
commande : annick.de-moncuit@orange.fr
Septembre 2013
François Tosquelles et la décence ordinaire, Nantes, 12 octobre 2012, sous la direction de Guy-Arthur Rousseau, préface de Pierre Delion, Actes de la journée de Nantes enrichis d’un cahier de l’exposition Création et folie. Association Continuo Ostinato 20€
Octobre 2013
Jean Oury, La décision, séminaire de Sainte-Anne 1985-1986
en compagnie de Jean Ayme, Fernand Oury, Pierre Delion, Danielle Roulot et de nombreux intervenants.
commande : annick.de-moncuit@orange.fr
commande : annick.de-moncuit@orange.fr
Mars 2011
Jacques Schotte, Nosographie
Jacques Schotte, Nosographie
Argument Olivier Legré, avant-propos Pierre Delion
Reproduction du cours de Jacques Schotte de 1977-78 présentant une systématisation inédite de la pensée psychiatrique s’opposant par là à l’indigence et aux ravages du DSM.
[...] Il s'agit là d'une mise en place d'opérateurs rigoureux, réarticulés à partir de la psychanalyse, la phénoménologie et la pensée psychiatrique européenne. Olivier Legré. 20€
commande : annick.de-moncuit@orange.fr
Novembre 2011
Walter Muschg, Freud écrivain
Walter Muschg, Freud écrivain
préface Jacques Sédat
Cet essai date de 1930, année où Freud, “tout enemble écrivain, savant et combattant“, se voit décerner le prix Goethe. Il montre la parenté entre la méthode d’écriture de Freud et sa méthode psychanalytique.
Traduction, introduction, annotations de Jacques Schotte. 15€
commande : annick.de-moncuit@orange.fr
Avril 2012
Fernando Vicente, La parole en psychiatrie. Encore efficace ?
Préface Jean Oury, argument Pierre Delion, avant-propos Michel Balat, postface Jacques Tosquellas.
"En proposant le terme de chronicité vivante, Fernando
revient sur une différence effectuée en 1964 par Bonnafé, Mignot et Le Guillant
entre chronicité et sédimentation. La première est consubstantielle de la
maladie mentale et la seconde résulte de l’abandon de la prise en compte de la première.
Donc pour que la chronicité ne fasse pas peur aux gens comme c’est encore trop
souvent le cas, et que le résultat de cette peur soit la sédimentation,
Fernando nous propose de la rendre vivante. Génial, non ? Dans cette vivance à
inventer, gît la psychothérapie institutionnelle. À quoi sert un club
thérapeutique ? À quoi servent les réunions de travail clinique réalisées entre
soignants, et quelquefois avec les patients eux-mêmes ? À quoi sert la
réflexion sur la déhiérarchisation statutaire pour laisser émerger une
hiérarchie subjectale ? Sinon à rendre ces lieux de déréliction de la folie,
habités par des personnages délirants quichottiques et daliesques, vivants et
en liens avec les personnes qui les prennent en charge.” Pierre Delion 15 €Lire l'argument de Pierre Delion en son entier plus loin
commande : annick.de-moncuit@orange.fr
Septembre 2013
François Tosquelles et la décence ordinaire, Nantes, 12 octobre 2012, sous la direction de Guy-Arthur Rousseau, préface de Pierre Delion, Actes de la journée de Nantes enrichis d’un cahier de l’exposition Création et folie. Association Continuo Ostinato 20€
commande : annick.de-moncuit@orange.fr
Octobre 2013
Jean Oury, La décision, séminaire de Sainte-Anne 1985-1986
De septembre 1985 à juin 1986, dix séances du
séminaire de Jean Oury, dont celle du mois de mars qui est une monographie de
Fernand Oury.
Année de travail avec l’art de Jean Oury de mettre en mouvement la question.
Est‐ce que ça existe la décision
? Qui décide ? La décision de quoi ? Que décide-t-on ?
À quel niveau topique ? Et s’il s’agit d’une fonction décisoire, qu'en est-il de cette fonction ?
“L’Autre
est au cœur de soi‐même bien avant qu’on le sache", mais : Qu’est‐ce
que l’acte ? “C’est un transfert d’angoisse”. Et l’acte
thérapeuthique ? Au niveau le plus concret, Jean Oury rappelle les paroles
d’Emmanuel Lévinas : “Nous sommes responsables de la responsabilité
d’autrui”. 25€commande : annick.de-moncuit@orange.fr
Mars 2014
Jacques Tosquellas, Francesc Tosquelles. Ses vices constitutionnels : psychiatre, catalan, marxiste. Préface Pierre Delion. Avec les textes de Enrique Serrano Guerra, Fernando Vicente, Michel Tosquelles, Antoine Viader, José Garcia Ibanez.
Jacques Tosquellas, Francesc Tosquelles. Ses vices constitutionnels : psychiatre, catalan, marxiste. Préface Pierre Delion. Avec les textes de Enrique Serrano Guerra, Fernando Vicente, Michel Tosquelles, Antoine Viader, José Garcia Ibanez.
Jacques
Tosquellas a “réussi le pari”, comme le dit Pierre Delion dans sa préface, de
faire revivre la présence de son père et de nous transmettre toute sa vivance
psychique et symbolique. Articulant l’action, l’œuvre et la vie de son père,
Jacques Tosquellas témoigne d’une grande générosité à nous confier des
souvenirs précis autant que privés et à aborder la question de l’analyse de
l’“institution” de manière exhaustive. Entouré de cinq “frères”, Jacques
Tosquellas ouvre ainsi autant de témoignages que de souci de partages, dans un
style des plus toniques... 25€
commande : annick.de-moncuit@orange.fr
Septembre 2014
Francois Tosquelles, Archives complètes, chantier I 1928-1943, Sardanes,
Francois Tosquelles, Archives complètes, chantier I 1928-1943, Sardanes,
sous la direction de Jacques Tosquellas, préface Patrice Hortoneda.
L'initiative de Jacques Tosquellas de rassembler des textes de son père, dispersés depuis 1928, permet de publier de nombreux volumes.
Ce
premier chantier inaugure de nombreux
autres volumes à venir. Il s’agit non seulement d’empêcher l’amnésie d’œuvrer,
mais d’empêcher tout “vol de l’histoire” – au
sens de Jack Goody d’éviter toute mainmise d’une histoire dominante sur une
autre – tant sur le travail de François Tosquelles, sa pratique, ses positions
de psychiatre ou de citoyen engagé, mais par là et au-delà, sur une grande
partie des mouvements qui ont secoué la psychiatrie, en France ou ailleurs. Ce
travail de devoir d’histoire fait face aux attaques mortifères permanentes menées
contre une psychiatrie à visage humain, qui continue à considérer l’autre
souffrant comme un sujet à part entière, un homme parmi les autres hommes. 20€
Octobre 2014
Jean Oury, Hiérarchie et sous-jacence, séminaire de Sainte-Anne 1991-1992
Jean Oury, Hiérarchie et sous-jacence, séminaire de Sainte-Anne 1991-1992
En compagnie de Jean Ayme, Pierre Delion, Danielle Roulot, Hélène Chaigneau, Michel Balat, et de nombreux autres intervenants.
Jean Oury : [...] Je suis pour les hiérarchies absolues, pour la hiérarchisation. Que chacun soit différent de l’autre, qu’il y ait une hiérarchie extraordinaire des fonctions, c’est ça la hiérarchisation !
[...] Ce qui est en question comme instrument de hiérarchisation fonctionnelle, multiple, hétérogène, qui favorise la singularité de chacun, c’est essayer de mettre en place quelque chose qui soit antihiérarchique et que je pourrais appeler provisoirement un système en réseaux. Tosquelles l’appelle filet institutionnel. Je lui ai dit : les nœuds du filet sont des nœuds ouverts...
* * *
[...] Quelles sont les conditions d’articulation entre les systèmes hiérarchiques et la sous-jacence ? Comment définir le site où il y a une collusion entre ces deux dimensions ? À quel niveau ?
[...] c’est la hiérarchisation de la distinctivité.
22€
commande : annick.de-moncuit@orange.fr
Février 2015
Jean-François Rey, Constellations. Henri Maldiney et la psychothérapie institutionnelle
Jean-François Rey, Constellations. Henri Maldiney et la psychothérapie institutionnelle
Henri Maldiney (1912-2013) a marqué de son
empreinte la phénoménologie de langue française. Jacques Schotte, qui fut son
élève et son ami, disait de lui qu’il était "le plus méconnu des grands et le plus grand des méconnus".
Marginalisé à l’université, son action auprès des psychiatres majeurs du siècle
dernier (Binswanger, Roland Kuhn, Jacques Schotte, Jean Oury) fut considérable.
Son nom est associé à une compréhension
existentielle de la folie : fécondité exceptionnelle de l’alliance entre
anthropologie phénoménologique, psychiatrie et psychothérapie institutionnelle.
Exceptionnelle surtout à l’heure où la psychiatrie est en train d’être
démembrée, piétinée, exclue des études médicales et où dominent les grandes
orientations de la "santé mentale" administrée.
Mais cette pensée forte et originale mérite
aussi une approche moins académique que ce qu’on aurait pu croire. Les concepts
fondateurs de la psychothérapie institutionnelle (institution, accueil, rencontre, pathique, pathoplastie)
sont ici interrogés dans leur lien original avec la philosophie d’Henri
Maldiney.
La collaboration avec Jean Oury, si présent
dans ces pages, était une pensée en commun qui ne se bornait pas à la clinique
en un sens restrictif, mais investissait l’art, la création et la schizophrénie
(Art brut, Francis Ponge, parmi d’autres).
En se plaçant sous le nom même de "constellations transférentielles",
ce livre se présente non seulement comme une lecture d’un grand philosophe qui
se donnait pour tâche de "penser
l’homme et la folie", mais surtout comme la défense et l’illustration
d’un libre exercice du traitement des psychoses et de l’accueil qu’on leur
ménage (le transfert dissocié, la lutte contre la pathoplastie) et de cette
inventivité qui délie et relie les dispositifs, les groupes, les sous-groupes,
bousculant les hiérarchies statutaires.
Maldiney, qui n’ignorait rien de ces
développements, a su montrer que la sortie hors des crises dépressives,
mélancoliques ou de la dissociation schizophrénique impliquait qu’on interroge
à nouveaux frais les notions de projet et d’autonomie, pour mettre l’accent sur
l’ouvert.
Être dans l’ouvert, c’est accepter de se
laisser surprendre par la rencontre d’une personne ou d’une œuvre d’art. Mais
c’est aussi se disposer à changer à partir de cette surprise même : transpassibilité si souvent bloquée dans
la psychose et dont le retour chez le sujet manifeste le lien renoué avec son
histoire.
À cette fin, il faut du temps, une pratique de
la parole libre et des circulations que l’établissement de soins ménage et
autorise. C’est ainsi qu’il faut comprendre cette formule de Maldiney :
"L’homme est en situation dans la psychiatrie, comme la psychiatrie
est en situation dans l’homme". 22€
Ce deuxième volume des archives de François Tosquelles couvre les années 1943 et 1944.
Suite au premier chantier, il en partage le même enjeu d'empêcher non seulement l’amnésie d’œuvrer, mais d’empêcher tout “vol de l’histoire” – au sens de Jack Goody d’éviter toute mainmise d’une histoire dominante sur une autre –.
C'est dans les paroles de Tosquelles en 1943 que se révèle déjà la base de la psychothérapie institutionnelle : l'enseignement certes, et ici ces témoignages vivants des notes de cours réalisés à Saint-Alban, mais aussi et surtout la nécessité d'analyse des défenses des soignants et de l'établissement en face du “fou”. Ce qui comte, c'est “l'idée thérapeutique” qui doit présider à l'organisation d'une "assistance rationnelle”. "La direction doit être pédagogique et médicale". Plus encore, la direction doit être psychiatrique. 20€
C'est dans les paroles de Tosquelles en 1943 que se révèle déjà la base de la psychothérapie institutionnelle : l'enseignement certes, et ici ces témoignages vivants des notes de cours réalisés à Saint-Alban, mais aussi et surtout la nécessité d'analyse des défenses des soignants et de l'établissement en face du “fou”. Ce qui comte, c'est “l'idée thérapeutique” qui doit présider à l'organisation d'une "assistance rationnelle”. "La direction doit être pédagogique et médicale". Plus encore, la direction doit être psychiatrique. 20€
* * *
INSTITUTIONS FIAC : Fédération
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fax 02 54 79 77 96
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Depuis avril 2015, La Boîte à outils s'est engagée dans une nouvelle formule
gérée par les Éditions d'Une
Elle est co-dirigée par Pierre Delion et Yannick Oury Pulliero
Renseignements : ICI* * *
Suite du livre de Fernando Vicente
Argument de Pierre Delion
Fernando Vicente, La parole en psychiatrie. Encore efficace ?
Argument de Pierre Delion
Fernando Vicente, La parole en psychiatrie. Encore efficace ?
≈
Dans ce récit très vivant et fourmillant de
pistes hétérogènes, plusieurs lignes de réflexions apparaissent à l’œuvre qui
font du texte une polyphonie très utile pour les personnes intéressées par une
psychiatrie à visage humain, mêlant un lamento
sur l’état actuel de la psychiatrie, des patients, de leurs professionnels et plus
généralement sur le sociétal contemporain, un chœur à plusieurs voix, chacune d’entre
elles racontant des histoires singulières de rencontres multiples et variées
qui ont compté pour l’auteur dans son parcours, et une basse continue, Francesc
Tosquelles, sorte de roc polymorphique, riche de tant de minerais différents,
qui assure une des bases de l’édifice que construit Fernando au long de sa vie
avec d’autres.
Mais c’est également une histoire très
touchante, car avec les éléments théoriques de sa réflexion, il associe
toujours, « permanemment » disait Tosquelles, des moments de vie : les
larmes de Tosquelles à la lecture de la lettre à Madame Delaunay « Vous n’avez
rien compris à mon pays... », les fragments quelquefois elliptiques, souvent
lumineux, d’histoires de patients, de souvenirs avec ses fils, de ses fonctions
diverses de psychanalyste, de « superviseur » (« épiscope » disait
Tosquelles), de citoyen hispano-français, sont toujours là pour éviter de
dériver dans un courant qui porte sur les écueils ou d’idéaliser dans un ciel
sans nuages. Ce faisant, les réflexions de ce quasi philosophe sont reliées à
la terre, celle sur laquelle les pieds fabriquent, tel un tombeau dédié à Machado,
le chemin en marchant...
Si les premières pages de citations semblent un
peu fastidieuses dans une première lecture, on comprend après qu’elles
introduisent le texte dans le souci de ne pas refuser les voies actuelles d’explication
du monde. Les symptômes, avant d’être ces réductions contemporaines, étaient
pour les médecins antiques éligibles au rang de signes, avec toute la part
insue qu’ils peuvent receler en eux. Delphes et les relectures proposées par
Michel Balat à sa fonction pythique, savent rendre à ces prolégomènes de
la sémiotique toute leur importance dans la démarche de recherche du sens, sans
se précipiter trop vite vers la seule signification.
D’ailleurs Fernando passe aussitôt à la question
du sujet de l’inconscient pour marquer l’ampleur de la révolution
psychanalytique et l’insistance que Lacan a accordée au retour à la lettre freudienne
pour mieux en déduire les conséquences, y compris en matière de psychothérapie
des psychoses. On y apprend au passage que la position d’« objectivité
subjective » est un outil précieux dans la valise du voyageur psychiatrique en
institution. Mais Tosquelles, Oury et quelques autres ont beaucoup milité pour
que l’institution et les institutions soient lues comme l’instance topique
nécessaire à la déclinaison des formes possibles de psychothérapies des
psychoses. Accueillir et prendre en charge, sur nos épaules psychiques, les
personnes psychotiques comme s’il s’agissait de sujets névrosés, présente
plusieurs risques signalés par Fernando, parmi lesquels la prescription
exclusive de médicaments ou l’externement arbitraire sont les plus visibles dans
la série de l’abandon des plus fragiles aux contre-indications de la
psychanalyse. La première au titre de l’impuissance de la parole dans le champ
des psychoses a rendre compte de quoi que ce soit, voire à transformer des
actes en éléments de compréhension, renvoie le patient vers la seule solution
médicamenteuse comme guérison symptomatique, à la plus grande satisfaction des
laboratoires pharmaceutiques, tandis que la deuxième résulte d’une pensée
toujours à l’œuvre aujourd’hui, et elle, reprise par les technocrates, rendant
responsable l’hospitalisation des maux qui la nécessitent. Combien de morts
sont elles le résultat peu ou prou de ces casuistiques douteuses ? Ne peut-on pas
penser les institutions autrement qu’en termes entropiques et plus précisément
en termes d’humanité ? Tosquelles, Oury et les autres, en inventant la
psychothérapie institutionnelle viennent nous dire, et Fernando sait de quoi il
parle, que l’institution est le mal nécessaire pour la psychothérapie des psychoses,
et il faut le dire, des personnes présentant des pathologies complexes
construites autour des dysharmonies psychotiques. Ou de toutes les autres
pathologies graves du champ psychiatrique.
En proposant le terme de chronicité vivante, Fernando
revient sur une différence effectuée en 1964 par Bonnafé, Mignot et Le Guillant
entre chronicité et sédimentation. La première est consubstantielle de la
maladie mentale et la seconde résulte de l’abandon de la prise en compte de la première.
Donc pour que la chronicité ne fasse pas peur aux gens comme c’est encore trop
souvent le cas, et que le résultat de cette peur soit la sédimentation,
Fernando nous propose de la rendre vivante. Génial, non ? Dans cette vivance à
inventer, gît la psychothérapie institutionnelle. À quoi sert un club
thérapeutique ? À quoi servent les réunions de travail clinique réalisées entre
soignants, et quelquefois avec les patients eux-mêmes ? À quoi sert la
réflexion sur la déhiérarchisation statutaire pour laisser émerger une
hiérarchie subjectale ? Sinon à rendre ces lieux de déréliction de la folie,
habités par des personnages délirants quichottiques et daliesques, vivants et
en liens avec les personnes qui les prennent en charge. La chronicité vivante n’est
pas un donné de l’expérience, elle est le résultat asymptotique d’un énorme
travail toujours à remettre sur le métier pour ne pas s’en laisser compter par
les idéologies du grand soir psychiatrique et autres fadaises
antipsychiatriques. Elle est la justification des décennies de travail et de
réflexion des équipes de psychiatrie qui continuent l’expérience de Saint- Alban
et de la Borde et de quelques trop rares expériences dans cette lignée féconde.
Voilà presque un mot d’ordre pour les soignants d’aujourd’hui : « Arrêtez de
déprimer et de pleurer sur le bon temps passé ! Rendez la chronicité vivante !
»
Dans cette perspective les éléments apportés par
Fernando sur la transmission, le transfert, la supervision et bien d’autres
concepts abordés au cours de son récit, deviennent autant d’éléments qui peuplent
par nécessité la vie d’une institution, d’une équipe de psychiatrie, d’une
équipe pédagogique, leurs réflexions collectives, leurs difficultés, leurs
souffrances et leurs avancées. La chronicité n’est plus un mot qui vient dire
tout haut ce qu’une certaine psychiatrie tend à cacher en développant une
attention exclusive sur les urgences et la psychiatrie aiguë, sans penser une seconde
que les signes de souffrance sont à comprendre dans la durée de nos transferts,
mais elle devient une locution qui réaffirme que la psychiatrie a pour mission
de prendre en charge les patients chroniques – l’urgence en psychiatrie
caricature la souffrance de patients chroniques pour qui l’urgence est
quotidienne – tout au long de leur existence et nous met en demeure de les soutenir
– fonction phorique – tout le temps qu’il faudra. Les patients nous attendent
au tournant de la durée. Et notre éthique nous commande de construire notre
exercice de la psychiatrie en référence à cette dimension existentielle fondamentale.
Tosquelles, Oury, Fernando Vicente font partie de ces personnes qui nous aident
à tenir ces engagements, certes sans solennité, mais avec vigueur et sans
compromission.
Pierre Delion
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